1976-11-08 : Grotte de Gournier

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Grotte de Gournier
08 novembre 1976
Année 1976
Date 08/11/1976
Massif Vercors
Département Isère
Nombre de Victimes 3
Durée Plus de 4 jours
Nombre de Sauveteurs 205

Le contexte

Samedi 6 novembre :

Vers 15 heures, 3 spéléologues rhodaniens, Daniel T., Roland C. et Michel S., entrent dans la grotte de Gournier. Ils ont pour objectif d'équiper au-delà de la salle Gathier. Il se font certainement surprendre par une forte crue lors du retour. Les précipitations, ainsi que leur retard, inquiètent leurs amis qui tentent en vain de les rejoindre.

Dimanche 7 novembre :

Vers 18 heures et sans nouvelle d'eux, 3 spéléologues de la même équipe décident d'aller à leur rencontre. Il s'agit de Michel BUGNET , Daniel COLLIARD et Pierre LICHERON. Leur progression est stoppée par le débit trop important au pied de la cascade de 12 mètres.

Lundi 8 novembre :

L'équipe ressort 1h00. Ce même jour, Michel BUGNET, Daniel COLLIARD, Gérard DUCLAUX, Maurice ALLARD, Patrick LAILY et Michel SIMEON pénètrent dans la cavité à 12h00 et tentent à nouveau d'entrer en contact avec leurs camarades non ressortis. Ils trouvent le corps de Roland C. en amont de la cascade de 12 mètres. Ne pouvant le ressortir, ils l’amarrent à une main courante en fil d'acier. Pendant que Patrick LAILY et Michel SIMEON sortent donner l'alerte, le reste du groupe continue ses recherches.

À 15h45, Pierre RIAS, spéléologue lyonnais, informe Albert OYHANCABAL que le groupe n'est pas ressorti de Gournier. Ce dernier se rend sur place pour se rendre compte du débit et il décide d'attendre 19h00 pour déclencher une opération. Il en profite pour mettre en alerte des spéléologues de la Société Spéléo Secours Isère depuis la gendarmerie de St Marcellin.

Le SAMU 38 dépêche 2 médecins : Olivier KERGOMARD et France GUILLAUME. Le premier est engagé immédiatement avec 2 spéléologues.

À 20h30, une équipe de 3 spéléologues, menée par Georges MARBACH, entre dans la cavité. Le dispositif monte en puissance avec l'arrivée de nombreux spéléologues, des sapeurs-pompiers de Seyssinet et des policiers de la CRS.

Mardi 9 novembre :

Compte tenu du débit dans la rivière souterraine, il est décidé de faire passer les sauveteurs par l’extrême amont de la galerie fossile et d'emprunter le P25 pour accéder à la rivière. Jean-Louis ROCOURT est chargé d'équiper cet accès.

À 1h45, l'équipe de Georges MARBACH sort de la cavité et signale que la reconnaissance opérée par les lyonnais jusqu'à la salle Gathier, n'a pas permis de retrouver les 2 spéléologues manquants. À 2h25 les lyonnais sortent.

À 3h00, une équipe menée par Henri ROSSETTI et composée de 7 personnes (dont Daniel ANDRES, plongeur), a pour mission de fouiller la zone entre le P25 et la cascade de 12 mtres. Une autre est chargée de récupérer le corps de Roland C. et de commencer son évacuation jusqu'au sommet du P25.

Vers 10 h, à l'arrivée des renforts lyonnais dirigés par Pierre RIAS, 3 équipes sont composées pour rechercher les 2 disparus. Olivier KERGOMARD est à nouveau engagé et part avec Philippe MOIGNET, Jacques ORSOLA (69), J. LOPEZ (69), J. MASSON et BARRAGIA. Les 2 derniers ont pour mission d'équiper la rivière à l'aval de la cascade de 12 mètres.

Sentant que l'opération risque de durer, Albert OYHANCABAL demande l'engagement de la Croix Rouge Française pour gérer la logistique. Dans le même temps, il fait installer une liaison filaire entre l'entrée et le P25, soit 1 850 m de fil.

Ce même jour à 13h00, Jean-Louis ROCOURT et Daniel ANDRES sortent et indiquent avoir trouvé le corps de Daniel T. dans une vasque située 50 mètres en aval de la cascade de 12 mètres. Daniel ANDRES a sorti le corps de l'eau et l’a déposé dans la galerie du Grand Chaos. Entre 15h10 et 16h10, Baudouin LISMONDE et 10 spéléologues, ainsi que 6 CRS, partent pour brancarder le corps dans la rivière. Le renfort de la Savoie est demandé.

La neige, tombée quelques jours avant l'opération, fond et vient gonfler la crue provoquée par les pluies qui s'abattent sur la région. À 22h40, Olivier KERGOMAR, qui aperçoit l'équipe de Baudouin LISMONDE du sommet de la cascade de 12 mètres, lui fait signe de se retirer car le niveau de l'eau monte très vite. L'équipe de 4 personnes, dont fait partie Olivier KERGOMAR, réussi à survivre à cette crue violente en trouvant refuge sur une vire confortable en hauteur et en aval de la cascade de 12 mètres. Ils atteignent cette vire par une escalade et des pendules. Ces sauveteurs ne ressortiront que le 12 novembre à 0h30 après avoir passé 60 heures sous terre.

Malgré ces conditions défavorables, qui bloquent les équipes rapatriant le premier corps (Roland C) découvert dans la galerie fossile, la liaison téléphonique est installée jusqu'à la cascade de 12 mètres et le corps de Daniel T. est évacué. Il sort le 10 à 6h00.

Mercredi 10 novembre :

Durant toute la journée, la crue continue à prendre de l'ampleur et le niveau du lac d'entrée ne cesse de monter. L'indication sur la jauge installée en sortie du lac passe de 58 à 0h35, à 120 à 20h00. Il s'agit là du pic de crue.

La priorité est alors de rejoindre l'équipe d'Olivier KERGOMAR. Il est décidé d'équiper très en hauteur la galerie de la rivière, avec une main courante permettant aux sauveteurs de progresser même si le niveau de la crue augmente. Les savoyards arrivent le 10 en début de soirée et sont immédiatement engagés pour cette mission.

Jeudi 11 novembre :

Entre le 10 novembre à 23h15 et le 11 à 3h25, les équipes de recherches, exceptée celle bloquée par la crue, doivent sortir de la grotte faute de pouvoir accomplir leur mission. Il est alors décidé de faciliter l'évacuation de l'eau des galeries en supprimant le verrou que constitue le passage de la Méduse, situé au-dessus du lac d'entrée. Des plongeurs artificiers le font sauter à 16h00 le 11 novembre, sans que cela ait un impact sur le niveau d'eau dans la cavité.

La décrue qui commence permet d'envisager la relève des équipes momentanément bloquées. France GUILLAUME part vers le fond prendre la relève d'Olivier KERGOMAR.

Vendredi 12 novembre :

Olivier KERGOMAR sort le 12 à 0h30. D'autres sont encore bloqués. Les sauveteurs fraîchement engagés vont faire la jonction avec eux et continuer les recherches. Dans la matinée, les prévisions météorologiques sont défavorables et de fortes précipitations sont attendues. Albert OYHANCABAL décide alors de suspendre les recherches. Les équipes sortent et, à 19h00, plus aucun sauveteur ne se trouve sous terre.

Samedi 13 novembre :

Le 13 novembre, aucun sauveteur n'est envoyé en mission. Au cours d'une réunion qui se tient en Préfecture, il est décidé de partir à la recherche du dernier disparu dès que les conditions de sécurité seront réunies. Une équipe de pointe est constituée, avec pour objectif d'aller jusqu'au siphon. Elle est composée de 6 spéléologues et France GUILLAUME. Elle partira avec 8 jours d’autonomie en espérant trouver le dernier imaginé survivant dans les parties sèches.

Dimanche 14 novembre :

La jauge du lac de Gournier est descendue à 54 et la décision de reprendre les recherches est prise à 12h00. L'équipe de pointe rentre à 22h15. Elle est précédée par une équipe de reconnaissance composée de 3 spéléologues, qui découvrent le corps de Michel S. vers minuit, à l'aval de la cascade de 12 mètres. C'est la crue qui a transporté le corps jusque-là.

Lundi 15 novembre :

Vers minuit, la mission des équipes envoyées sous terre est de sortir les corps de Michel S. et de Roland C. Des spéléologues, des plongeurs, des sapeurs-pompiers et des CRS participent à l'évacuation. Les corps sortent respectivement à 12h15 et 15h20. Le déséquipement de la cavité s'achève vers 20h00. À ce moment-là, plus aucun sauveteur ne se trouve dans la cavité.

Sauveteurs engagés

Ont participé à cette opération :

  • 96 spéléologues, dont 3 plongeurs, tous originaires de l'Isère, du Rhône et de la Savoie.
  • 11 CRS.
  • 21 pompiers, dont 2 radios.
  • 58 secouristes de la Croix Rouge Française, par vacations de 7 à 8 personnes.
  • 11 membres du SAMU, par vacations de 3 personnes.
  • 8 gendarmes en permanence sur le site.

La liste exhaustive des sauveteurs ayant participé à cette opération n'est pas disponible. Néanmoins, nous savons que les personnes suivantes étaient présentes :

Isère
Jean-Louis ROCOURT Henri ROSSETTI Marc ROSSETTI Lucien CHABERT Pierre CHABERT
Philippe MOIGNET Gilles LINGER Bernard PLAN Henri BARRAGGIA Jean-Pierre POUCHOT
Serge GRASSI René PAREIN Dominique PAREIN Jacques MASSON Daniel ANDRES
Georges MARBACH Bruno BEGOU Gérard CANO-BRUYERE Henri-Jacques SENTIS Pierre GARCIN
Jean-Pierre VINCENT Guy BRABANT Jacques CARPENE Olivier KERGOMARD France GUILLAUME
Baudouin LISMONDE Bruno TALOUR Patrick DUPILLE Jean-Louis BLANCHARD Gérard FRANCONIE
Robert GIRARD Jacky GLAUDA Étienne CHAMPLOVIER Guy MASSON Mike MEREDITH
MOLLARD Yves PERRET Serge CAILLAULT MARTINEZ PASCALLAQUA
PASCALE Yves GAUDILLOT Bernard QUINT Jean-François TISSEYRE SOMBARDIER
Joël FAVRE-NOVEL Serge AVIOTTE Gilbert MANTOVANI Albert OYHANCABAL Fernand PETZL
Savoie
Jean-Louis FANTOLI Robert DURAND Jean-Pierre CAILLETTE Jacques NANT Hervé JEANTON
Pierre DUFORT Daniel POLLET Yves GOURJU Philippe FIEL Christian HERMENE
Jean-François LOICHOT
Rhône
Pierre RIAS Jacques LOPEZ Jacques ORSOLA Jean-Luc THEVENIN Jean-François CUTTIER
Philippe BIGEARD Bernard LIPS Gilbert LEFAUCHEUX Édouard MEUNIER Robert LAVABRE
Benoît LEFAHLER Alain GRESSE Michel BUGNET Patrick LAILY Pierre CAHINGT
Christophe BOUVARD Charles SCHMIDT Georges FURRER Jean-Pierre COLIN Bernard LOUIT
Yves BRILLAUD Gilbert GROS Yves LEGUEN Jean-Pierre LICHERON Gérard BRUN
Jean-Claude ARNAUD Jacques CHANEL Daniel CALEGARI Bernard CONSTANTIN Maurice ALLARD
Jeanine VIDEZ Jacqueline QUET Raymond ROUCAIROL Christian RIGALDI Christian QUET
Michel SIMEON

Épilogue

Pour la seule main courante de la rivière entre le P25 et la cascade de 12 mètres, 700 mètres de cordes et 150 amarrages (spits, plaquettes, mousquetons ou maillons) ont été nécessaires. Pour la liaison téléphonique, ce sont 3 000 mètres de fil qui ont été déroulés.

En conclusion de son compte rendu, Albert OYHANCABAL souligne la participation des CRS et des pompiers sous terre. Il note que la mixité des équipes a été rendue possible grâce aux formations dispensées par l'École Française de spéléologie (EFS) et à la normalisation du matériel, tant personnel que collectif.

Il rejoint en cela les conclusions de Fernand PETZL, suite au dernier secours au gouffre Berger.

Documents

Articles de presse

Sources

  1. Le témoignage de Michel SIMEON, recueilli par Albert OYHANCABAL.
  2. Le compte-rendu établi par ce dernier.