1996-07-11 : Gouffre Berger : Différence entre versions
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=== Mardi 9 juillet === | === Mardi 9 juillet === | ||
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+ | ''« La journée commence par la prise de la météo du jour. Le bulletin indique : « pas de précipitations significatives, vent de Nord, tendance à l'amélioration ». Dès 7h00, j'appelle au gîte pour donner les consignes, réveil et gros repas. Vers 11h30, la première équipe de reconnaissance entre dans le gouffre avec à sa tête Paul MACKRILL.'' | ||
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+ | ''Après avoir transmis les informations dont je disposais à la Préfecture, j'appelle le CODIS pour leur communiquer ces informations tout en leur demandant de ne pas inscrire cela dans la main courante pour éviter la presse. Ensuite débutent les pré-alertes des effectifs SSSI. Luc SAUVAJON, CTA, se rend au CODIS pour réguler tous les appels.'' | ||
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+ | ''Vers 14h00, je me rends au gîte « Le Château » à Autrans et questionne plus en détail les spéléologues anglais, Graham NAYLOR traduisant, notamment sur le « timing » des « attardés ». Il s'agit donc d'un groupe de six, entrés dans le gouffre samedi 6 juillet en début après-midi. Après une nuit passée au camp 1 cote -500, la première équipe devait entamer la descente vers le fond vers 11h le dimanche 7 juillet. La seconde vers 12-13h. Première arrivée prévue au fond vers 15h00. La seconde arrivée prévue au fond vers 18h00.'' | ||
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+ | ''Ce dimanche sur le secteur, les précipitations ont commencé à 16h00 allant crescendo. Ce qui veut dire, connaissant bien les colères de ce gouffre, le lapiaz de surface sans rétention possible de l'eau qui s'engouffre aussitôt, la verticalité du réseau, que ces six spéléologues vont se faire surprendre en remontant par une onde de crue, dans les parties les plus dangereuses. Une fois engagés dans cette zone, il n'y a pas d'échappatoire.'' | ||
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+ | ''La première équipe de reconnaissance ressort vers 22h20. Personne au camp 1 à -500, vérifications jusqu'aux Couffinades cote -640 : Personne. Demi-tour et sortie, sauf Paul MACKRILL et Tony WHITE qui continuent avec un complément de matériel. Les eaux sont hautes.'' | ||
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+ | ''A 23h30, Paul MACKRILL rend compte par téléphone de la situation : Lui et son co-équipier sont ressortis, les Couffinades passent tout juste, la rivière est très grosse, les cordes sont sous l'eau, certaines sont détériorées. Ils ont été contraints de faire demi-tour. L'équipe 2 reste sous duvet au camp 1. Elle retournera voir le niveau d'eau vers 6h00 mercredi 10 juillet et poursuivra la progression. Il faut dès à présent prévoir de quoi réchauffer individuellement les attardés. »'' | ||
=== Mercredi 10 juillet === | === Mercredi 10 juillet === |
Version du 25 novembre 2020 à 22:18
Année | 1996 |
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Date | 11/07/1996 |
Massif | Vercors |
Département | Isère |
Nombre de Victimes | 6 |
Durée | Plus de 4 jours |
Nombre de Sauveteurs | 299 |
Sommaire
Le contexte
Le 1er groupe
William S. (G.B.), Nicola D. (G.B.) et Käroly T.(H.) entrent dans le gouffre Berger samedi 6 juillet 1996 entre 13 et 14 heures. Ils arrivent au camp 1 (-500) vers 19h00-19h30 où ils passent la nuit après un repas. Ils repartent dimanche 7 juillet vers 9h30 avec comme objectif le fond et remonter. La descente se fait sans difficultés. Arrivés en haut du puits de l'Ouragan (-975), Nicola, fatiguée, reste en haut du puits. William et Käroly descendent et s'arrêtent au camp des Étrangers à -1075 où ils font demi-tour et entreprennent la remontée, il est environ 16h30.
Käroly remonte en tête, suivi de Nicola et William. L'équipe croise les Hongrois de la deuxième équipe, en train de descendre, vers la Vire-Tu-Oses (-950). À ce moment-là, William prend la tête du groupe suivi de Nicola et Käroly. La progression ne devait guère être rapide, Nicola étant fatiguée. Ils ont vue sur l'actif (rivière) au bas du Grand Canyon et ne remarquent pas de hausse de débit particulière. La progression continue.
Attaque de la Cascade des Topographes par William. Arrivé en haut, Nicola monte suivi de Käroly. William remarque que la corde était très près du niveau de l'eau dans la cascade. Il s'arrête au dernier amarrage pour attendre Nicola. Après dix minutes d'attente, et constatant une augmentation du débit, il angoisse en ne voyant pas les deux autres arriver. Puis il entend un cri de Käroly. William revient sur ses pas, aperçoit Nicola bloquée à la rupture de pente Toboggan-Cascade qui lui dit « j'ai un problème ». Constatant sa difficulté de progression, il lui conseille de s'aider en mettant son bloqueur sur la corde de la main courante.
Malgré cette précaution, elle n'avance plus. L'eau montant alors très vite, William crie à Nicola de vite redescendre. Le temps d'entreprendre sa descente, l'eau est à la hauteur de sa poitrine. La forte poussée exercée alors, l'empêche de débloquer sa poignée. William fait alors demi-tour et a lui-même de grandes difficultés pour s'extraire du flot. En se retournant, il ne voit plus sa camarade. Par deux fois, l'eau montant, il doit se réfugier plus haut sur des épaulements rocheux. Ceci se passe entre 21h30 et 22h00.
Käroly, de son côté, essaie de l'aider en coupant la corde de la main courante, mais peine perdue. Nicola est entièrement recouverte par l'eau. Il la voit glisser. Lui-même doit vite se dégager et redescendre se mettre à l'abri un peu plus bas. L'accident se produit vers -730 environ, dans la cascade des Topographes.
Le 2ème groupe
Il est composé de Zsolt M., Miklos N. et Istvan T., tous trois Hongrois. Ils entrent dans le gouffre samedi 6 juillet 1996 entre 19h00 et 19h30. Ils arrivent au camp 1 (-500) vers minuit, où eux aussi vont dormir après un repas. Ils partent le dimanche 7 juillet vers 13h30. Objectif : le fond et déséquipement.
Ils descendent sans difficulté et croisent la 1ère équipe vers la Vire-Tu-Oses. Arrivée à -1075, au camp des Étrangers, constatant l'important débit de la cascade en rive droite (Rivière -1000) barrant la galerie, et l'un d'eux n'étant pas équipé de combinaison néoprène, ils font demi-tour et remontent en déséquipant. Le passage de la « Baignoire » n'étant pas encore amorcé, ils arrivent au bas de la grande cascade de 27 mètres. Istvan est en tête suivi de Miklos et Zsolt. Pour eux, le débit d'eau au pied de cette cascade n'est pas jugé encore trop alarmant.
L’équipe arrive en haut de la cascade de 27 mètres. Zsolt, qui est le plus aguerri, prend la tête du groupe. Il entreprend en vain la remontée de l'obstacle suivant appelé le ressaut du Singe, haut de 10 mètres. Trop d'eau. Il décide de redescendre. Istvan commence alors sa descente et se fait piéger.
Miklos, voyant le danger, se longe rapidement sur l'amarrage intermédiaire. Son camarade Zsolt le rejoint et se longe également sur le même amarrage. Ils sont tous deux accrochés à la main courante lorsqu'ils voient monter l'eau d'environ 1,50 mètre. Istvan est hors de vue, caché sous la cascade.
Ils restent ainsi accrochés par leurs baudriers et la pédale de bloqueur environ 30 heures à la cote -915. L'eau ayant baissé, ils s'installent sur un bombement pour ensuite attendre encore environ 15 heures. Zsolt essaie de remonter mais échoue, il y a encore trop d'eau. Après une nouvelle attente de 5 heures, ils peuvent enfin installer une corde de secours et descendre la cascade de 27 mètres. Ils aperçoivent au passage leur camarade Istvan, mort sur la corde, sous la cascade, et ils se mettent à l'abri un peu plus bas dans une zone pas très confortable, où les secours les trouveront très affaiblis, en hypothermie.
L'opération de sauvetage racontée par Albert OYHANÇABAL
Lundi 8 juillet
« Dès le lundi 8 juillet 1996 à 20h45, Paul MACKRILL, spéléologue anglais, sauveteur SSSI, chercheur au synchrotron et habitant Lans-en-Vercors, me signale la présence dans le Gouffre Berger d'un groupe d'Anglais et Hongrois, faisant partie de l'expédition du « Oxford University Cave Club », club ayant une autorisation d'explorations du 1er au 10 juillet 1996. Ce groupe est formé d'une première équipe de trois personnes : un Anglais, une Anglaise et un Hongrois et d'une deuxième équipe de trois Hongrois. Objectif du groupe : le fond du gouffre à -1122 mètres et remontée en déséquipant, le bas devant être déséquipé par l'équipe hongroise. Sortie prévue en matinée ce jour (8 juillet).
Ce même jour, une équipe de cinq Anglais s'est engagée au matin dans le réseau pour aller aux nouvelles. Un peu inquiets compte-tenu des très fortes précipitations se déversant sans discontinuer sur zone entre le dimanche 7 juillet 16h00 et lundi 8 en fin de matinée. J'ai vérifié : il est tombé non pas, comme prévu par la météo, 80mm, mais 240mm.
Cette équipe est revenue au gîte à Autrans vers 20h00, indiquant les plus grandes difficultés de progression dans les premiers puits très arrosés, et l'impossibilité de dépasser la cote -250. Un véritable torrent déferlant dans la Grande Galerie (rivière de la Boue).
Après un point sur les effectifs anglais disponibles, je demande aux autres de se reposer pour être sûrement engagés le lendemain. Consignes données à tous : envoi dès demain matin mardi 9 juillet, d'une équipe de reconnaissance et soutien (avec nourriture, carbure, duvets) de quatre hommes. En prévoir une autre suivant peu après, surtout ne rien tenter avant, le réseau est encore en charge. Je fais part au chef d'expédition que la SSSI les prend sous la couverture assurance de spéléologue secours et sont placés sous l'autorité du CT et des CTA. »
Mardi 9 juillet
« La journée commence par la prise de la météo du jour. Le bulletin indique : « pas de précipitations significatives, vent de Nord, tendance à l'amélioration ». Dès 7h00, j'appelle au gîte pour donner les consignes, réveil et gros repas. Vers 11h30, la première équipe de reconnaissance entre dans le gouffre avec à sa tête Paul MACKRILL.
Après avoir transmis les informations dont je disposais à la Préfecture, j'appelle le CODIS pour leur communiquer ces informations tout en leur demandant de ne pas inscrire cela dans la main courante pour éviter la presse. Ensuite débutent les pré-alertes des effectifs SSSI. Luc SAUVAJON, CTA, se rend au CODIS pour réguler tous les appels.
Vers 14h00, je me rends au gîte « Le Château » à Autrans et questionne plus en détail les spéléologues anglais, Graham NAYLOR traduisant, notamment sur le « timing » des « attardés ». Il s'agit donc d'un groupe de six, entrés dans le gouffre samedi 6 juillet en début après-midi. Après une nuit passée au camp 1 cote -500, la première équipe devait entamer la descente vers le fond vers 11h le dimanche 7 juillet. La seconde vers 12-13h. Première arrivée prévue au fond vers 15h00. La seconde arrivée prévue au fond vers 18h00.
Ce dimanche sur le secteur, les précipitations ont commencé à 16h00 allant crescendo. Ce qui veut dire, connaissant bien les colères de ce gouffre, le lapiaz de surface sans rétention possible de l'eau qui s'engouffre aussitôt, la verticalité du réseau, que ces six spéléologues vont se faire surprendre en remontant par une onde de crue, dans les parties les plus dangereuses. Une fois engagés dans cette zone, il n'y a pas d'échappatoire.
La première équipe de reconnaissance ressort vers 22h20. Personne au camp 1 à -500, vérifications jusqu'aux Couffinades cote -640 : Personne. Demi-tour et sortie, sauf Paul MACKRILL et Tony WHITE qui continuent avec un complément de matériel. Les eaux sont hautes.
A 23h30, Paul MACKRILL rend compte par téléphone de la situation : Lui et son co-équipier sont ressortis, les Couffinades passent tout juste, la rivière est très grosse, les cordes sont sous l'eau, certaines sont détériorées. Ils ont été contraints de faire demi-tour. L'équipe 2 reste sous duvet au camp 1. Elle retournera voir le niveau d'eau vers 6h00 mercredi 10 juillet et poursuivra la progression. Il faut dès à présent prévoir de quoi réchauffer individuellement les attardés. »
Mercredi 10 juillet
Jeudi 11 juillet
Vendredi 12 juillet
Samedi 13 juillet
Dimanche 14 juillet
Lundi 15 juillet
Mardi 16 juillet
Mercredi 17 juillet
Épilogue
299 sauveteurs ont été engagés pour 4 975 heures de missions sous terre dont 3 724 pour les seuls membres du SSF (79%) et 1 072 en surface.
Les appareils de la Sécurité civile de la base de Grenoble ont effectué 26 heures de vol pour cette opération Il s'agit de la plus grande opération survenue en Isère.
Le coût de l'opération s'élève à 196 748,28 Francs. Après une vive polémique sur le coût de cette opération avec le Maire d'Engins, il apparaît que la commune a été remboursée par le Conseil Général à hauteur de 231 638 Francs. Elle a aussi encaissé le chèque de caution des britanniques pour 10 000 Francs et des sommes versées par les assurances anglaises pour 31 132 Francs. Le total perçu par la commune s'élève à 272 769,71 Francs.
Les suites
La gestion d'Albert OYHANÇABAL est remise en cause par le SSF et par certains isérois. Lui sont reprochés notamment le manque de traçabilité dans le déroulé des événements et l'absence de documents de gestion sur les 4 premiers jours. La préfecture le soutien mais son départ est proche. Il ne gérera plus seul d'opération et laissera sa place en 1998 après plus de 30 ans au service des autres.
Sauveteurs engagés
Croix Rouge Française
La Croix Rouge Française a assuré une permanence pour fournir des repas. 807 seront préparés. 25 personnes sont intervenues à ce titre :
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ADRASEC 38
L'ADRASEC 38 a assuré les transmissions entre le PC, la Molière et l'entrée de la cavité. Ont participé à cette opération :
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Les sauveteurs spéléos
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Témoignage de Thierry LARRIBE
Témoignage d'Alain MAURICE
Témoignage de Bernard OYHANÇABAL
Témoignage d'Enzo MINELLI
Témoignage de Jean-François SIEGEL
Sources
- compte-rendu d'Albert OYHANÇABAL.
- INFO SSF n°42 septembre 1996.
- Spéléo Secours Isère 1970-2010 : 40 ans de secours souterrain – Comité Départemental de Spéléologie de l'Isère.
- Lettre de Bernard PERAZIO, Conseiller Général en date du 16/04/1999, relative au remboursement du Conseil Général à la commune.
- compte-rendu de Patrick RICHARD, chef de la base hélicoptère de la Sécurité Civile de Grenoble.
- compte-rendu de César GALLO, responsable de la Croix Rouge Française en date du 23 juillet 1996.
- compte-rendu de Jean Paul YONNET, responsable de l'ADRASEC 38.
- compte-rendu financier d'Albert OYHANÇABAL.